Paquita : la joie par le rouge

Date
Jan, 16, 2025

Probablement, le ballet Paquita est trop mélodramatique. Il a une histoire typique entre un jeune officier au cœur pur et un membre de la famille royale. Ce membre est enlevé et élevé par des gitans. Pourquoi adorons-nous encore les mélodrames à l’opéra ou dans un ballet ? Parce que l’appréciation que nous donnons sur ce genre de spectacle n’est évidemment pas liée à l’aspect littéraire. Elle n’est pas plus affectée par l’intrigue éculée jusqu’à plus soif. Surtout, elle dépend de plusieurs éléments sensoriels et visuels. Il s’agit de la danse, des costumes, des couleurs, de la mise en scène et de la musique. Ce sont ces éléments qui forment un tout harmonieux transcendant la trame et les personnages archi-convenus.

Ce ballet, dont l’action est peut-être un peu trop mélodramatique, a parfaitement réussi. La richesse et la singularité des costumes de l’Empire, la beauté des décorations, et surtout la perfection de la danse de Carlotta Grisi, ont assuré son succès.
Théophile Gautier, La Presse, 6 avril 1846

Reconstituée par Pierre Lacotte et accompagnée par une musique signée Minkus, Paquita est un ballet pantomime. Il offre de la joie aux spectateurs. Il présente aussi des scènes pittoresques dans la campagne espagnole.

Qui n’aime pas une dose de légèreté et de festivité dans sa vie ? Dès le début du ballet, l’ambiance est joyeuse et colorée avec des mélodies et des danses gitanes. Ce rythme lumineux efface instantanément la monotonie hivernale de Paris. Le 26 décembre au soir, nous avons eu la chance d’assister à une très chouette interprétation de Germain Louvet dans le rôle de Lucien d’Hervilly. Il jouait le soldat au grand cœur. Hannah O’Neil était dans le rôle de Paquita, la jeune noble élevée par les gitans. Ces deux étoiles de l’Opéra de Paris semblent taillées pour ces personnages et l’atmosphère vibrante et lumineuse de Paquita.

©Laurent Philippe
©Laurent Philippe

Particulièrement remarquable, la danse et la présence d’Hannah O’Neil. Son costume rouge de gitane, avec ses teintes flamboyantes, semble avoir été conçu sur mesure pour elle. Depuis que je l’ai vue incarner Titania dans Le Songe dune nuit dété, je suis envoutée par sa danse. Sa performance m’a ensorcelée. À cette époque, je pensais que son sourire éclatant était le secret de son charme. Ce soir, cependant, j’ai découvert un autre élément clé : sa manière de faire vivre la couleur.

Le rouge lui va comme un gant, c’est un prolongement de ses gestes et une émanation de son essence. Pourtant, ce n’est pas la couleur qui sublime sa danse. C’est cette étoile magnifique qui, par son art, transcende la matière et la lumière. Comme le dit Pierre Lacotte à propos de sa reconstitution de Paquita :

Même accompagnés de la musique, les pas ne suffisent pas à reconstituer une œuvre. Un ballet du passé est une chose complexe et fragile. Son authenticité est au-delà de la seule chorégraphie.

Ainsi, le costume de gitane d’Hannah O’Neil ne fait pas qu’habiller le personnage de Paquita ; il devient une partie d’elle, fusionnant avec son corps et ses mouvements. Grâce à son interprétation, le rouge prend âme, imprégnant chacun de ses gestes d’une énergie et d’une profondeur inégalées.

C’est précisément pour cette transcendance entre les couleurs et les danseurs que des ballets comme Paquita continuent de séduire et de triompher depuis le XIXe siècle. Les mélodrames trouvent une autre dimension sur scène. La magie du spectacle vivant les transforme malgré les nombreuses critiques soit-disants avisées et intelligentes. Le ballet est une expérience immersive. C’est une fusion totale des sens et des émotions. La danse, la musique, les costumes et les artistes s’unissent pour offrir un moment inoubliable. Nous serons toujours invités à rêver, à ressentir et à célébrer la beauté intemporelle du ballet.

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